Le 30 novembre 2023, Lucas Colomban a brillamment défendu sa thèse intitulée « Interactions Between Whistler Waves And Solar Wind Suprathermal Electrons : Solar Orbiter And Parker Solar Probe Observations ». Lucas a effectué une analyse détaillée des ondes observées par Solar Orbiter et Parker Solar Probe, grâce, entre autres, au capteur SCM présent sur ces satellites et développé au LPC2E. Il a montré que les ondes de sifflements pouvaient expliquer la largeur en angle d’attaque des électrons suprathermiques du vent solaire. Bravo Lucas !
Résumé de la thèse :
L’évolution de la fonction de distribution des électrons du vent solaire avec la distance héliocentrique présente des caractéristiques encore inexpliquées. Nous pouvons citer l’augmentation de la largeur angulaire du faisceau d’électrons suprathermiques aligné avec le champ magnétique (Strahl). Cette augmentation est associée à une augmentation de la densité relative des électrons suprathermiques plus isotrope du halo et à la diminution rapide du flux de chaleur. Dans cette thèse, nous cherchons à préciser le rôle des interactions ondes-particules dans cette dynamique et en particulier à savoir si les ondes de sifflement peuvent expliquer l’augmentation observée de la largeur angulaire du Strahl.
Pour ce faire, nous effectuons d’abord une analyse statistique de ces ondes avec Solar Orbiter et Parker Solar Probe (PSP), entre 0,2 et 1 UA. 110 000 paquets d’ondes sont détectés et caractérisés dans le référentiel du plasma. L’écrasante majorité des ondes ont un angle de propagation θ quasi-aligné avec le champ magnétique. Au-delà de 0,3 UA, les ondes sont alignées avec le Strahl (y compris lors des « switchbacks »), et il n’y a pratiquement pas d’ondes obliques (θ ~ 70°). Ces dernières ont pourtant été prédites par de nombreuses études et sont théoriquement très efficaces pour diffuser les électrons du Strahl. À 0,2 UA, environ la moitié des ondes sont « counter-streaming » et la proportion d’ondes obliques reste très faible. Les caractéristiques des ondes sont ensuite utilisées pour calculer les coefficients de diffusion dans le cadre de la théorie quasi-linéaire. Ces coefficients sont intégrés, en utilisant l’occurrence des ondes, afin de déduire l’effet global des siffleurs sur les électrons suprathermiques. Au-delà de 0,3 UA, les ondes de sifflement peuvent expliquer l’augmentation observée de la largeur angulaire du Strahl et sont efficaces pour isotropiser le halo. Nous montrons que la diffusion du Strahl est due à des ondes légèrement obliques, θ ∈[15,45]°. Près de 0,2 UA, les ondes counter-streaming diffusent les électrons de Strahl plus efficacement que les ondes alignées avec le Strahl de deux ordres de grandeur.
Par ailleurs, un problème technique avec une bobine du fluxmètre tri-axial (SCM) de PSP à la fin de l’orbite 1 nous a empêché de déduire directement les propriétés de polarisation des ondes de sifflement pour les orbites suivantes. Nous proposons une technique utilisant les champs électromagnétiques disponibles pour reconstruire les composantes manquantes (et donc les propriétés de polarisation des ondes) en négligeant le champ électrique parallèle au champ magnétique. Cette technique est applicable avec les hypothèses suivantes : (i) la fréquence de l’onde dans le repère du plasma est petite par rapport à la fréquence cyclotronique électronique ; (ii) un petit angle de propagation par rapport au champ magnétique ; et (iii) une grande vitesse de phase par rapport à la vitesse du vent solaire perpendiculaire au champ magnétique. La méthode ne peut pas être appliquée si le champ magnétique est aligné avec la bobine du SCM concernée. Nous validons notre méthode en utilisant les mesures en mode rafale effectuées lors de l’orbite 1. Les conditions de reconstruction sont satisfaites pour 80% des siffleurs détectés. Cette méthode permet de révéler pour la première fois les propriétés de polarisation des ondes sifflantes jusqu’à 10 rayons solaires (~ 0,05 UA).
Ce travail est une étape importante pour la prise en compte des interactions ondes-particules dans les modèles cinétiques et pour améliorer notre description du vent solaire.